Pourquoi un traitement chirurgical de ce panaris est-il nécessaire ?
Un panaris est une infection bactérienne des tissus mous du doigt. Il correspond à un abcès et évolue en plusieurs phases :
- La première phase est celle de l’inoculation, piqûre, petite plaie, manipulation des peaux péri unguéales, se ronger les ongles, etc…. L’accident initial peut être banal ou minime et même être passé inaperçu.
- La phase suivante est une inflammation avec gonflement et rougeur localisée. A ce stade un traitement non opératoire vous a peut-être été proposé avec des pansements ou des bains antiseptiques qui peuvent suffire à guérir l’infection par réaction immunitaire.
- Si ce traitement ne suffit pas, le panaris est rapidement douloureux avec une douleur qui devient pulsatile et lancinante, souvent insomniante, la pulpe des doigts étant très sensible. Le doigt est gonflé et du pus peut être parfois vu par transparence à travers la peau ou s’écouler. Le panaris est alors dit « mûr » et doit être opéré. Il n’y a plus de place pour un traitement non opératoire, comme des antibiotiques par exemple.
Pourquoi l’ intervention est-elle nécessaire :
Il s’agit d’une infection de la main, qui est toujours grave.
En effet, la main se défend mal de l’infection du fait de la nature des tissus qui la composent. Le risque est la diffusion de l’infection. Il faut enlever la totalité des tissus infectés et nécrosés pour stopper cette diffusion.
Quellepe utêtre l’évolution e n l’ absence d’ intervention :
L’infection peut diffuser localement aux structures nobles du doigt (os, articulation ou tendons qui se défendent mal de l’infection) ou par voie générale par voie lymphatique (lymphangite) ou sanguine (septicémie).
Pour être précis, il y a en fait plusieurs types de panaris selon leur localisation sur le doigt :
- Le plus habituel est le panaris péri unguéal qui atteint un des replis de la peau autour de l’ongle, souvent après manipulation des replis péri unguéaux, « les peaux » ou se ronger les ongles. Le risque de diffusion de ce type est lié à la proximité immédiate de l’ongle et de sa matrice qui peuvent s’infecter. L’articulation inter phalangienne distale, qui est sous la matrice de l’ongle, peut s’infecter avec une arthrite infectieuse. Le tendon extenseur peut être atteint
- Le panaris « pulpaire » atteint la pulpe palmaire du doigt. Le risque est la nécrose purulente de la pulpe du doigt qui peut être totale, l’atteinte des nerfs sensitifs des doigts, du tendon fléchisseur ou de l’os qui peuvent devoir être excisé. La pulpe est l’organe de la préhension et de la sensibilité du toucher. Ces structures ne se reconstituent pas.
- Le panaris anthracoïde est une sorte de furoncle de la peau dorsale des phalanges proximales. Une forme associée est le panaris en « bouton de chemise » qui est un panaris dorsal ou péri unguéal et qui diffuse en profondeur, devenant pulpaire. Il représente une forme déjà tardive et plus grave.
2- Le déroulement de l’ intervention .
Une intervention vous sera proposée en urgence ou dans un délai rapide.
Avant l’intervention chirurgicale :
L’organisation de la chirurgie, même en urgence, entraîne un délai en fonction des possibilités des différents intervenants et des disponibilités du bloc opératoire, en particulier en ce qui concerne la prise en charge des autres urgences. Durant ce délai, les examens complémentaires peuvent vous êtes prescrits
: radiographie à la recherche de corps étranger ou de lésion du squelette.
Une prise de sang à visée infectiologique peut être indiquée en cas de signes de diffusion.
Des antibiotiques peuvent vous être administrés en cas de signes de diffusion générale de l’infection.
L’anesthésiste vous verra avant l’intervention, il lui est nécessaire de connaître vos antécédents car certaines pathologies peuvent interférer avec l’infection (diabète, immunodépression, artérite, insuffisance rénale, etc…) et votre traitement actuel.
Plusieurs types d’anesthésie peuvent vous être proposées : loco régionale (anesthésie du membre supérieur seulement) ou anesthésie générale, notamment s’il y a des signes de diffusion de l’infection contre indiquant parfois la précédente technique.
Le tabac diminue l’oxygénation des tissus et leur vascularisation. Il favorise la propagation de l’infection, et doit être arrêté dès le diagnostic de l’infection. Des substituts nicotiniques ou une consultation spécialisée vous seront proposés en post opératoire en cas de difficultés de sevrage.
L’intervention chirurgicale :
Elle se déroule sous garrot pneumatique (brassard sur le bras ou l’avant bras) ou parfois sous garrot du doigt pour éviter les saignements durant l’intervention et pour permettre au chirurgien de mieux visualiser les zones infectées
Elle comporte un temps d’exérèse de tous les tissus infectés et d’exploration chirurgicale des tissus infectés. S’agissant d’une infection de la peau, il faut enlever la peau infectée (excision du panaris).
Le geste est en règle rapide, ce qui peut vous surprendre mais ne doit pas minimiser son importance.
Complications pendant l’intervention :
Elles sont rares et découlent habituellement de la découverte de l’étendue de l’infection.
Le chirurgien sera guidé par l’aspect des tissus pour guider l’étendue de l’exérèse des tissus. Il est important de pratiquer l’exérèse de tous les tissus infectés afin d’éviter la propagation ou la rechute rapide de l’infection.
Des prélèvements bactériologiques seront effectués pour guider une éventuelle antibiothérapie. Celle-ci n’est pas systématique, mais peut être imposée par une forme sévère d’emblée, une évolution défavorable ou des antécédents particuliers.
L’ongle peut être le siège d’une infection qui oblige à l’ôter, il repoussera sans séquelles si la matrice n’est pas atteinte. L’atteinte des zones de croissance de l’ongle : matrice et lit unguéal peut laisser des séquelles unguéales : déformation, stries, défauts de croissance
En cas de découverte d’une infection des tendons, le chirurgien peut décider durant l’intervention et dans votre intérêt, de pratiquer d’exérèse du tendon infecté. Celui-ci ne peut guérir malgré les antibiotiques si le stade est trop avancé.
Une infection articulaire doit être traitée en elle même ce qui peut nécessiter une immobilisation par attelle, broches ou mini fixateurs externes.
L’infection cutanée peut être plus importante que ce qui est visible (cas notamment des peaux mélanodermes) et nécessiter une exérèse plus étendue que ce qui était prévisible.
Enfin, toute intervention chirurgicale étant un processus complexe, celle-ci peut être différée – y compris sur la table d’opération- si les conditions n’étaient pas réunies pour sa réussite, en adéquation avec les recommandations actuelles.
Le chirurgien vous informera en postopératoire des constatations faites, du pronostic et du programme thérapeutique envisagé.
En postopératoire :
Évolution prévisible :
Dans la majorité des cas une hospitalisation ambulatoire est suffisante.
Le pansement sera refait en consultation et contrôlé pour vérifier la bonne évolution de la plaie.
La plaie se refermera seule secondairement par cicatrisation dirigée, ce qui peut nécessiter des pansements quotidiens au début.
En fonction de la taille de l’excision initiale, la cicatrisation est obtenue en général en 2 à 4 semaines.
La plaie et le pansement sont la source d’inconfort, et souvent d’incapacité au travail au début, surtout pour les professions manuelles ou à hygiène réglementée (cuisiniers, soignants, etc.)
Des antalgiques seront prévus, dès les urgences en cas de douleur, et notamment pour les interventions ou les pansements. Il est important de signaler ces douleurs à l’équipe soignante pour adapter le traitement.
La repousse de l’ongle est le plus souvent perturbée pendant plusieurs mois, l’aspect définitif n’étant atteint qu’au bout d’un an environ.
Parfois la situation est plus grave :
L’infection progresse malgré la chirurgie et le traitement ce qui impose une nouvelle chirurgie.
En cas de nécessité d’exérèse étendue des tissus, une chirurgie de reconstruction sera l’objectif. Elle est indiquée seulement après la fin des phénomènes infectieux.
Il peut s’agir de chirurgie plastique pour permettre la fermeture des plaies par greffe de peau, greffe tissulaire vascularisée (lambeaux cutanés), ou des procédés de reconstruction tendineuse en plusieurs temps.
Toute affection grave de la main peut donc nécessiter une hospitalisation et des soins prolongés. Le chirurgien vous expliquera dès les premiers jours, en fonction de l’évolution, les différentes possibilités.
Malgré la chirurgie et le traitement anti-infectieux des complications sont possibles :
Parfois la diffusion de l’infection, malgré tous les traitements effectués, entraîne des chirurgies et des excisions tissulaires itératives. Ceci peut aboutir à une dégradation de l’état vasculaire du segment de membre qui peut ne plus être irrigué, ou une impossibilité de conserver la fonction du segment de membre, notamment si les nerfs ont été touchés.
De façon exceptionnelle, l’évolution peut imposer à votre chirurgien de discuter une indication d’amputation d’un segment de doigt. Une diffusion générale de l’infection avec septicémie peut engager le pronostic vital.
Les soins en eux-mêmes peuvent être à la source de complications : complications des perfusions, complications des immobilisations, complications des traitements antibiotiques, décompensation de pathologies qui étaient quiescentes ou bien contrôlées.
À plus long terme des séquelles sont possibles :
La phase de traitement peut entraîner des soins prolongés et donc une incapacité qui peut être longue.
Les séquelles esthétiques sur l’ongle sont fréquentes, les raideurs articulaires s’installent facilement, elles seront traitées par rééducation qui peut être prolongée.
Les douleurs à la phase aiguë peuvent être importantes, et persister à un certain degré à plus long terme. Elles peuvent faire l’objet de traitements complémentaires, notamment en cas de douleur régionale complexe (algodystrophie). Une intolérance au froid avec des douleurs et des changements de couleur du doigt peut être séquellaire.
Les cicatrices imposées par la chirurgie et les excisions tissulaires peuvent être importantes, inesthétiques, définitives et parfois douloureuses. Une chirurgie de reconstruction cutanée pourra être discutée.
Votre délai de réflexion :
S’agissant d’une situation urgente le délai de réflexion habituelle pour accepter l’intervention doit être, dans votre intérêt, le plus court possible.
Votre chirurgien peut néanmoins répondre aux questions qui vous préoccupent.
Cette fiche d’information n’est pas exhaustive. Certaines complications sont particulièrement exceptionnelles et peuvent survenir dans un contexte spécifique. Il est important de comprendre que toutes les complications ne peuvent pas être précisées de façon exhaustive.